Les hélices Éclair ont équipé le Sopwith britannique de reconnaissance, le Dorand AR et surtout les Spad, en particulier le Spad VII.
Après avoir coordonné la fabrication du Caudron G 3, Marcel Bloch (futur Marcel Dassault) est affecté à la réception des essais en vol des avions Farman à Buc : « Mon rôle consistait à voler avec les pilotes et à établir ensuite un rapport sur les performances et les qualités de vol de chaque appareil. » « A cette occasion, j’effectuais de nombreux vols en qualité de chef de bord pour contrôler les temps de montée et la maniabilité de chaque appareil. »
Dès qu’il a du temps libre, Marcel Bloch entreprend d’améliorer l’hélice du Caudron G 3 dont il a constaté le médiocre rendement. Il travaille alors pour son propre compte. Pour construire l’hélice qu’il étudie et dessine, le jeune ingénieur pense à son ami Marcel Minckès dont le père est fabricant de meubles au faubourg Saint-Antoine. Ce dernier accepte. Marcel Dassault se souvient : « Il aimait qu’on fût hardi et entreprenant, aussi consentit-il à mettre à ma disposition un ébéniste et quelques planches de noyer. »
Disposant des moyens de réaliser son hélice, Marcel surveille personnellement sa fabrication : « Je fis le dessin de mon hélice, je traçai les différentes sections, ce qui permit à l’ouvrier de réaliser des gabarits. Je restai à côté de lui pendant qu’il rabotait son hélice, de façon à conduire sa main vers des lignes harmonieuses. »
Elle est essayée à Buc, par un des pilotes de Blériot, puis est présentée au centre d’essais du Service technique à Villacoublay : « Cette hélice fut reconnue la meilleure et le fabricant de meubles qui l’avait construite sous ma direction [Hirch Minckès] reçut une première commande de cinquante hélices. Le prix de chacune d’elles était de 150 francs à l’époque. Il fallait donner un nom à notre hélice, ce fut l’hélice » Éclair « . »
Elle équipe d’abord les Caudron G 3 à moteur Clerget de 80 cv. C’est un bon début, d’autant plus que la bataille de Verdun qui fait rage, depuis février 1916, entraîne des commandes supplémentaires d’avions donc d’hélices. Marcel Bloch est alors détaché chez Hirch Minckès : « Commençant à avoir trop de travail, je proposai à Potez de venir travailler avec moi. Il quitta sans regret le bureau d’études de Caudron. »
Comme il faut produire rapidement, Marcel Bloch propose à Hirch Minckès de créer une société. Ce dernier consulte plusieurs de ses amis dont E. Dumaine, directeur général de la Société des moteurs Clerget, qui l’encourage dans cette voie. Hirch Minckès et son associé, Edeline, montent la Société des Hélices Éclair dont Marcel Bloch et Henry Potez sont directeurs techniques et auprès de laquelle l’armée les détache.
Plusieurs menuisiers viennent renforcer leur équipe tandis que la société Clerget encourage leur entreprise en passant des commandes d’hélices-freins pour ses bancs d’essais. Leur affaire se développe et occupe un étage entier de la fabrique de meubles de l’avenue Parmentier dont ils constituent une section à part. Les deux amis sous-traitent à l’extérieur les éléments qui doivent être usinés : « Nous faisions découper les pales à l’extérieur, nous les collions chez lui et il fallait ensuite les faire débillarder. Tous les fabricants de meubles du faubourg Saint-Antoine s’étaient mis à construire des hélices Éclair. »
Leur association est une réussite. Les hélices Éclair équipent le Sopwith britannique de reconnaissance construit sous licence en France, le Dorand AR et surtout les Spad, en particulier le Spad VII du plus célèbre des as français, Georges Guynemer, cher au cœur de Marcel Bloch : « Lorsque l’avion de Guynemer, » Le Vieux Charles » aux dix-neuf victoires, fut présenté aux Invalides comme témoin de gloire, je suis allé le voir et en arrivant j’ai vu, naturellement, l’hélice. Or c’était une hélice que j’avais étudiée et construite. J’en ai ressenti une grande satisfaction et peut-être un peu d’orgueil. »
En 1917, c’est le succès pour les deux sous-lieutenants dont la Société devient en quelques mois l’un des quatre grands constructeurs d’hélices alors qu’il n’existe pas moins de quarante fabricants et deux cent cinquante-trois séries différentes. L’Inspection du matériel décide de ne conserver que trois séries d’hélices au maximum pour un avion. Parmi elles figure l’hélice Éclair. Marcel Bloch et Henry Potez entrent ainsi dans la légende de l’aviation.
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